La semaine dernière, les organisations de terrain SOS Jeunes, Médecins du Monde, la Plateforme Citoyenne de Soutien aux Réfugiés et Médecins Sans Frontières ont tiré la sonnette d’alarme. Elles constatent que le nombre de mineurs non accompagnés en errance à Bruxelles est en augmentation. Et cela, alors que les moyens et ressources pour un accueil et un accompagnement prioritaire et adapté manquent drastiquement.
Ces derniers mois, le nombre de MENA pris en charge par Fedasil fut très élevé. Combiné avec les mesures Corona qui sont toujours en place, cela a mis une grande pression à tous les niveaux du réseau d’accueil fédéral.
Pour soulager cette pression, l’accès à l’accueil de mineurs en dehors des heures de bureau a donc été limité sur base des critères dits de “vulnérabilité”. Actuellement, seuls les mineurs suivants sont reçus en dehors des heures de bureau :
- Les filles
- Les MENA avec une vulnérabilité médicale ou psychologique
- Les garçons jusqu’à 15 ans inclus
- Les mineurs à la frontière qui sont maintenus sur le territoire
- Les MENA porteurs d’ un handicap
- Les MENA victimes potentielles de la traite des êtres humains
Ces critères sont présentés comme une “nécessité opérationnelle“. Cependant, les MENA constituent tous et toutes une catégorie particulièrement vulnérable. Faire une distinction entre les MENA vulnérables et non vulnérables est en contradiction avec la loi sur l’accueil des demandeurs d’asile et viole notamment la Convention internationale sur les droits de l’enfant et la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.
Les travailleurs de terrain observent que les jeunes vulnérables – après un long processus d’information sur leurs droits et les possibilités d’obtenir une protection en Belgique – sont prêts à entrer dans le système de protection. Lorsqu’ils tombent ensuite sur une porte fermée, ils peuvent à nouveau perdre confiance – naissante – dans notre système et dans les travailleurs de proximité. Les services responsables font de leur mieux pour trouver une solution pour les jeunes qui ne répondent pas à ces critères de vulnérabilité, mais le plus souvent, cette solution n’est pas trouvée. Ces jeunes sont ensuite invités à se présenter le lendemain matin afin de se voir attribuer un lieu d’accueil . Par conséquent, ces mineurs sont contraints de passer (à nouveau) la nuit dans la rue ou, au mieux, dans des squats.
Un mineur qui doit (sur)vivre dans de telles conditions est exposé à de nombreux dangers. Le risque de devenir une victime de la traite des êtres humains ou d’autres réseaux d’exploitation est élevé. En outre, les travailleurs de terrain déclarent que la majorité de ces jeunes n’effectuent pas de nouvelles demandes d’hébergement, mais optent pour un transit vers un autre pays ou encore d’autres pistes.
On nous assure que tout est fait au niveau politique et budgétaire pour ouvrir de nouvelles places d’accueil pour les MENA dès que possible et que de nombreuses mesures ont déjà été prises pour augmenter la capacité d’accueil sur le plan opérationnel et pour éliminer l’arriéré des dossiers auprès des autorités d’asile. Ces efforts sont, bien sûr, à saluer, mais nous constatons qu’ils restent insuffisants.
Cette crise de l’accueil nécessite une solution structurelle. Nous demandons un accueil de qualité, égalitaire, non discriminatoire et, conformément à la Convention relative aux droits de l’enfant, adapté aux besoins et exigences spécifiques et réels de ce groupe de mineurs vulnérables.
Nous rappelons au Secrétaire d’Etat à l’Asile et à la Migration, Monsieur Sammy Mahdi, son obligation légale de fournir un cadre approprié pour tous les MENA, conformément à la loi sur l’accueil. L’intérêt supérieur de l’enfant doit toujours être la considération première dans l’accueil des MENA.
Nous estimons qu’une forme de pré-accueil est nécessaire pour ce groupe cible de mineurs et que tout doit être mis en œuvre pour que chaque MENA soit pris en charge par le service de tutelle à toute heure du jour ou de la nuit conformément à la loi et bénéficie d’un accueil adapté.
Signataires :
Association pour le droit des étrangers (ADDE)
Coordination et Initiatives pour Réfugiés et Étrangers (CIRÉ)
Défense des Enfants International – Belgique
Ligue des droits humains
Nansen
Médecins du Monde
Ordre des barreaux francophones et germanophones de Belgique (Avocats.be)
Plateforme Citoyenne BELRefugees Burgerplatform
Plate-forme Mineurs en exil
SB Overseas
Service Droit des Jeunes de Bruxelles
Vluchtelingenwerk Vlaanderen